Juvénile de Zootoca vivipara

Le réchauffement climatique accélère le vieillissement des lézards

Une étude publiée dans Proceedings of the National Academy of Sciences révèle qu’une accélération du vieillissement s’associe au déclin démographique d’un lézard à cause de l’augmentation des températures. Les auteurs ont constaté que les télomères, les extrémités protectrices des chromosomes, deviennent de plus en plus courts de génération en génération, ce qui implique que la progéniture naît avec un « capital vieillissement » de plus en plus faible. La dynamique des télomères devrait représenter un biomarqueur moléculaire de la disparition locale des espèces, et probablement une solution prometteuse pour évaluer les futures actions de gestion de la biodiversité.


lezard juvenil
Juvénile de Zootoca vivipara dans son habitat caractéristique (tourbière des Narcettes) malheureusement aujourd’hui en déclin. © DUPOUÉ Andréaz

🔗 Article du site de CNRS INEE

L’information génétique des chromosomes est protégée par des structures non codantes à leurs extrémités, les télomères. Ces séquences d’ADN se raccourcissent à chaque division cellulaire et passé un certain seuil, les problèmes occasionnés pour les cellules entraînent leur sénescence puis leur mort. Ce vieillissement est le prix à payer pour générer et mobiliser de l’énergie par l’activité cellulaire. On le sait, le réchauffement climatique est susceptible d’accélérer la vitesse inhérente du vieillissement, comme l’illustre l’érosion plus rapide des télomères associée à l’augmentation des températures. Ce biomarqueur intègre le rythme de vie individuel et de possibles effets parentaux à travers la lignée germinale. La question est de savoir si la dynamique anormale des télomères dans les populations proches de l’extinction est un phénomène hérité, vécu, ou les deux. 

Ici, les auteurs de l’étude ont exploré la co-variation entre l’histoire de vie, la longueur des télomères et le risque d’extinction au sein de trois classes d’âge d’un lézard adapté au froid (Zootoca vivipara) et confronté à des disparitions locales induites par des températures anormalement chaudes. Les résultats montrent que la variation des longueurs de télomères entre individus suit les mêmes relations de seuil avec le risque d’extinction de la population quel que soit l’âge, y compris chez les nouveaux nés, suggérant une accumulation intergénérationnelle d’un vieillissement accéléré dans les populations en déclin. A savoir que dans ces populations anormalement chaudes, la plupart des nouveau-nés héritent des télomères déjà trop courts, ce qui suggère qu’ils sont nés physiologiquement vieux et qu’ils ont peu de chances d’atteindre l’âge de maturité sexuelle. Par ailleurs, chez les femelles adultes, les télomères passent d’un indice de qualité individuelle dans les populations stables à un biomarqueur des coûts de reproduction dans celles proches de l’extinction. Les auteurs ont donc compilé ces résultats pour proposer un modèle de boucle du vieillissement et conceptualiser la façon dont le raccourcissement des télomères induit par le climat chez les ectothermes peut s’accumuler à travers les générations et générer des points de basculement avant la disparition locale de l’espèce.

🔗 Lire aussi l’article du Huffpost : À cause du réchauffement climatique ces lézards naissent déjà vieux

Laboratories involved

Publication

Andréaz Dupoué, Pauline Blaimont, Frédéric Angelier, Cécile Ribout, David Rozen-Rechels, Murielle Richard, Donald Miles, Pierre de Villemereuil, Alexis Rutschmann, Arnaud Badiane, Fabien Aubret, Olivier Lourdais, Sandrine Meylan, Julien Cote, Jean Clobert, Jean-François Le GalliardLizards from warm and declining populations are born with extremely short telomeresPNAS. 2022

Contact

Andréaz Dupoué

Laboratoire des sciences de l’environnement marin (LEMAR – CNRS / IRD / Ifremer / UBO)

andreaz.dupoue@gmail.com

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